Retour aux sources ou Back to basics pour citer les propos en v.o. du batteur Dom Howard qui regardait visiblement dans le passé de Muse en allant bien au-delà des trois derniers opus mainstream (Black Holes & Revelations, The Resistance et The 2nd Law) pour viser rien de moins que le séminal Showbiz (1999). Avec Drones, leur septième album, Muse cultive certaines habitudes (bonnes ou mauvaises, choisis ton camp camarade) mais frappe fort. Matthew Bellamy aux commandes, ses obsessions pour le manichéisme des leaders, les humains-victimes expiatoires et les complots malins prennent (enfin) la forme dun véritable album conceptuel. Là où le « Exogenesis » de The 2nd Law tentait la chose à grand renfort denvolées lyriques (très critiquées), Drones sautorise un véritable story-telling scénarisé. Une dramaturgie assumée.
Laction nous embarque donc dans un monde contrôlé par les drones et les robots, sur les traces dun héros ayant perdu tout espoir en lhumanité, hapé par les forces du mal qui lui feront subir un lavage de cerveau pour le transformer en tueur délite avant quil ne tente un dernier soubresaut de révolte contre le système Car Matthew Bellamy garde en tête que « la force dun seul individu peut renverser tout un système ». Si.
Lambition du projet se distingue ici des collègues de stades qui préfèrent habituellement lintime évanescent à lanticipation schizophrène façon Philip K. Dick. Évidemment, Muse surfe toujours sur ses références (dans le désordre U2, Depeche Mode, Queen) auxquelles on rajoutera ici Ennio Morricone (si, si), Metallica et même Deep Purple et Rush (quoi ?) avec la cartouche « Reapers ». Le côté froid et martial tellement villipandé sur les productions précédentes revient en trombe, justifié par les thématiques évoquées. Et toc !
À ce petit jeu, le ton est donné dès « Dead Inside » qui braconne dans le binaire avant de lâcher les chiens mais pas les siens dans un final climatique. Évidemment, il y aura toujours des goguenards pour beugler contre ces égarements aux velléités pop. Pourtant, lalbum, possède une vraie beauté formelle, condense des chansons incarnées qui jouent plutôt habilement à saute-mouton. Car Muse ne parvient pas toujours à éviter le too much. Quand ils laissent de côté leurs guitares sauvages, les anglais absorbent des tonnes de choses sucrées (« Mercy », « Aftermath ») sans complètement verser de le diabétique. La tension baisse dun cran. Lattention également. Mais en explorant le côté glauque de sa trame, Drones reprend le manche (comme sur la pochette) et flirte dans un univers cousin de Archives, le mélange des voix en moins.
Et du chant, parlons-en. Si Matthew Bellamy nélargit pas son univers personnel, il ne se prend plus pour une réincarnation de Freddie Mercury et regagne une identité, une énergie, une panoplie démotions brutes de décoffrage. Du riff dodu (« Psycho »), charnu (« The Handler »), presque sur-joué sur du rock grincheux à défaut de cérébral (on nest plus très loin de « Stockholm Syndrome »), abrasif (« Defector ») et plutôt inspiré. Nhésitant pas à plaquer des voix-off et à tirer la pelote, Muse matérialise la chose sur les dix minutes de « The Globalist » confirmant une aisance mélodique qui parvient à compresser sa discographie avec ce disque imparfait dans ses zig-zag incessants mais bourré déclairs et détincelles.
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